N° 42 - Décembre 2008
 

Parole donnée au professeur Caillaud

Une campagne d'échanges confraternels, avec pour thème une meilleure prise en charge des patients asthmatiques, a débuté au mois d'octobre. Dans ce cadre, les médecins-conseils vont rencontrer en Auvergne plus de 250 praticiens généralistes.
Le professeur Denis Caillaud, chef de service de pneumologie et allergologie au CHU de Clermont-Ferrand, a accepté de dispenser une formation aux praticiens-conseils chargés de ces échanges ; le docteur Catherine Simon-Voldoire l'a rencontré pour PSA.

En premier lieu, un rappel épidémiologique : en France, l'asthme concerne 3,5 millions de personnes et affecte 6,8 % de la population générale.
Le contrôle de l'asthme est encore insuffisant pour de nombreux patients adultes qui vivent avec des symptômes quotidiens.

Près d'un tiers des patients régulièrement traités par antiasthmatique ne bénéficie pas d'un traitement de fond préventif par corticoïdes inhalés, comme le préconisent les recommandations de pratique professionnelle pour l'asthme. De plus, la prescription des associations fixes de médicaments antiasthmatiques (corticoïdes plus broncho-dilatateur de longue durée) semble dépasser le nombre restreint de patients auxquels ils devraient être réservés.

PSA> Si vous le permettez, il est peut-être nécessaire de rappeler ce qu'est l'asthme et quels en sont les diagnostics différentiels ?

DC> L'asthme est une maladie inflammatoire chronique des voies aériennes où de nombreuses cellules jouent un rôle important, notamment les mastocytes et les éosinophiles. Cette inflammation chronique entraîne une hyperréactivité bronchique avec apparition de signes cliniques aigus à répétition de type sifflements expiratoires, toux et oppression thoracique, en particulier durant la nuit ou au petit matin.
Ces épisodes s'accompagnent d'une obstruction bronchique variable.
Le principal diagnostic différentiel est la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) qui survient en général chez des adultes de plus de 40 ans, le plus souvent fumeurs ou anciens fumeurs. De plus, la prise en charge thérapeutique est différente puisque les corticoïdes inhalés n’améliorent pas le volume expiratoire maximum seconde (VEMS), contrairement à l’asthme.
En dehors de la BPCO, les autres principaux diagnostics différentiels sont la dysfonction des cordes vocales de la femme jeune, l’insuffisance cardiaque gauche et l’embolie pulmonaire du sujet âgé.

PSA> La mortalité par asthme a fortement diminué en 20 ans puisque nous sommes passés de 2 000 à 1 000 décès par an et cette baisse semble directement liée à la prise en charge et aux évolutions thérapeutiques, notamment la généralisation des corticoïdes inhalés. Malgré tout, nous savons que le taux annuel des patients hospitalisés, soit aux urgences, soit en hospitalisation conventionnelle varie de 1,4 % à 2,7 %. Ces hospitalisations sont directement liées à un contrôle insuffisant de cet asthme. Pourriez-vous nous préciser les différents critères servant à définir le contrôle de l'asthme ?

DC> Il y a six critères de contrôle, comme le présente l'étude GINA 2006 et mon diaporama :

Critères de contrôle
Niveaux de contrôle
Contrôlé
Contrôlé partiellement
Non contrôlé
Symptômes ≤ 2/semaine > 2/semaine ≥ 3 des critères de contrôle partiel
Symptômes Aucun Quelques
Limitation des activités Aucune Quelques
Utilisation de BCDA ≤ 2/semaine ≥ 2/ semaine
Fonction pulmonaire (DEP ou VEMS) Normale < 80 %/ref
Absentéisme Non   possible
Exacerbation Aucune ≤ 1/an > 1/an

Ainsi, 30 % des asthmes sont bien contrôlés, 20 % insuffisamment et 50 % non contrôlés (étude réalisée par Partridge et collaborateurs ERS 2005).

Avec l'étude GINA 2006, il y a adaptation du traitement en fonction du contrôle.
Ainsi, une évaluation régulière du traitement de fond, avec modification de ce traitement par palier, est nécessaire jusqu'à l'atteinte du bon niveau de traitement, correspondant à la dose minimale efficace (DME) de corticoïdes inhalés permettant la persistance du contrôle de l’asthme .
Ceci peut permettre de passer progressivement à un traitement par corticoïdes inhalés seuls à faibles doses (< 1000 g d’équivalent béclométasone), avec au maximum 2 prises de secours par inhalé par semaine.
Il faut toujours avoir en tête le rapport bénéfice/risque des corticostéroïdes inhalés en traitement de fond :

  • bénéfices avec la notion que le maintien de faibles doses prévient la mortalité et évite le risque de perte de contrôle,
  • risques qui sont dose/dépendant sur les os, la peau, les yeux. 

PSA > Quelle que soit la sévérité de l'asthme, vous nous avez précisé le rôle essentiel de l'éducation du patient. Peut-on résumer ce qui a changé avec GINA ?

DC > La simplification de la démarche thérapeutique et l'adaptation du traitement selon le contrôle et non en fonction de la sévérité.
Par contre, ce qui n'a pas changé :

  • les bases du traitement de fond : CSI +++
  • les niveaux de traitement
  • la nécessité d'une éducation thérapeutique (compliance et bonne technique d’inhalation des thérapeutiques utilisées)
  • la nécessité d'une adaptation thérapeutique pour tendre vers un contrôle optimal, en considérant : les six critères de contrôle et le contexte : allergies, environnement, facteurs associés.

Pour en savoir plus, consultez :

     

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