Parole
donnée : Benoît Cajat, interne et futur généraliste
Benoît Cajat,
jeune interne en médecine générale à Clermont-Ferrand et Président
du SARHA (Syndicat autonome des résidents et internes en médecine
générale des hôpitaux d'Auvergne), a accepté de rencontrer l'équipe
de Professions Santé Auvergne (PSA) et de nous présenter son parcours,
ses attentes et ses espoirs quant à l'avenir de la médecine générale.
PSA
> Pourquoi avoir fait le choix de la médecine générale ?
BC
> A l'heure actuelle, à Clermont-Ferrand, nous sommes 124 internes
de médecine générale répartis sur trois ans. Après avoir réussi
le concours de l'internat, ancienne formule, j'ai fait le choix
de m'orienter en médecine générale. J'effectue actuellement mon
5e semestre (sur 6 au total) au SAMU 63. Un épisode intéressant
lors de ma formation : j'ai réellement découvert la médecine générale
lors de mon stage effectué chez les praticiens auprès des docteurs
P. Vorilhon à Montferrand et V. Tournilhac à Murol. De plus, depuis
mai 2004, j'effectue des remplacements en zone péri-urbaine qui
me permettent de vivre le quotidien des médecins généralistes.
On peut déplorer
que durant notre deuxième cycle d'études médicales, aucun stage
ne soit proposé pour découvrir la médecine générale. Nous sommes
formés par des spécialistes de services hospitaliers, valorisant
la spécialité technique aux dépens des actes de soins courants,
ainsi que le travail en équipe, en structure suréquipée aux dépens
du cabinet. Or, il est nécessaire que soit créée une filière universitaire
de médecine générale (FUMG) avec des chefs de cliniques et des professeurs
de médecine générale. Puisque la médecine générale doit être reconnue
comme une spécialité à part entière, il faut que l'examen de l'internat
ne valide que des candidats ayant la moyenne, ce qui n'est actuellement
pas le cas. Le nouvel internat ne nous satisfait pas pleinement
tant au niveau de la répartition généralistes - spécialistes, que
de la formation et du choix de la faculté. Ces critiques tendent
à faire évoluer les choses vers la pratique d'une médecine générale
de qualité.
PSA
> Que pensez-vous de la convention ?
BC
> Une réforme était nécessaire, pour responsabiliser tant les patients
que les personnels soignants mais la demande que j'exprime au travers
de mon syndicat est la reconnaissance du médecin généraliste en
tant que seul médecin traitant. Parallèlement, cette option obligatoire
nous inquiète : comment trouver une nouvelle patientelle alors que
tous les patients potentiels seront inscrits chez un médecin lorsque
nous nous installerons ? Dans nos récentes discussions avec monsieur
le ministre Douste-Blazy, un moratoire autour de l'installation
serait à l'étude.
Je trouve que
le parcours de soins permet de valoriser le rôle du médecin traitant,
s'il est généraliste mais on demande beaucoup d'efforts et d'économies
aux seuls médecins généralistes et assez peu aux spécialistes, notamment
hospitaliers (la mise en place de la T2A changera peut-être "la
donne", quand 58 % des dépenses de santé publique sont consommées
par la seule hospitalisation). En ce qui concerne les génériques,
c'est une très bonne chose à laquelle notre génération est parfaitement
formée, cependant les pharmaciens devraient être plus en charge
de cette substitution systématique. Pour moi l'application de la
réforme à l'avenir sera plus facilement effective, car les nouvelles
générations de médecins généralistes ont été formées à la polyvalence
et sont sensibles aux économies de santé. Ce fait est accentué par
une démographie médicale en baisse qui ne génère pas de surenchère
concernant des actes ou prescriptions médicales.
PSA
> Comment envisagez-vous votre installation ?
BC
> Les nouveaux internes espèrent avoir une qualité de vie préservée.
Il ne s'agit pas de demander au médecin de travailler 35 heures
mais de respecter une qualité de vie proportionnelle au nombre d'années
d'études effectuées. La médecine n'est pas un sacerdoce, mais un
métier à exercice libéral qui doit laisser la place à la vie de
famille, comme pour tout autre Français. La façon dont j'envisage
l'exercice de ma profession est très proche de celle de la majorité
des internes comme le montre une étude réalisée dans la région de
Lille.
Consultez
l'étude présentée dans la revue du praticien, n° 688 - 689, 4
avril 2005, tome 19
(disponible en ligne avec l'accord de l'auteur, Robin Semal).
PSA
> Enfin, comment voyez-vous l'avenir de la médecine générale?
BC
> L'avenir de la médecine générale repose sur l'évolution des conditions
d'exercice (qualité de vie préservée, notamment familiale). Il s'agit
d'un exercice facilité par des aides pérennes, un exercice en groupe,
une meilleure organisation de la permanence des soins, de nouveaux
outils pour faciliter le travail administratif, une meilleure connaissance
du dossier du malade et surtout, d'un médecin généraliste reconnu
comme spécialiste.
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